Alors que le refus par l’Autorité de Supervision Indépendante des redevances aéroportuaires (ASI) d’homologuer les tarifs d’Aéroports de Paris (ADP) pour 2019 (+2,944%) portait l’espoir d’un retour à la raison, son acceptation de la deuxième offre d’ADP à +1% sonne le glas de son indépendance.
Comment en effet douter d’une remise au pas de l’ASI par son autorité de tutelle lorsque cette décision ne s’accompagne d’aucune autre explication que « le taux de rémunération des capitaux investis qui correspondrait à un taux de couverture à 100% est d’un niveau que l’Autorité considère comme acceptable ».
Qu’est-ce qu’un taux « acceptable »? Comment est calculé ce « taux de rémunération des capitaux investis »? Quelles hypothèses de charges et d’impôts ont-elles été retenues ? Sur quels fondements l’ASI peut-elle se satisfaire d’une deuxième proposition d’ADP inférieure de « 2% par rapport aux tarifs antérieurement notifiés » alors que l’ensemble des compagnies aériennes convient qu’une baisse significative des tarifs (-10% selon le SCARA) serait légitime ?
Nul ne le sait, l’ASI se gardant bien de fournir les détails de sa réflexion, de peur peut-être de sa fragilité ; comme par exemple la référence prise pour le calcul des « capitaux investis » quand l’audit commandé par la Ministre des Transports fin 2017 (soit il y a plus d’un an) en réponse à une interpellation du SCARA sur le sujet et qui permettrait justement de préciser ce montant, n’a toujours pas démarré.
L’ASI avait pourtant trouvé une parade au carcan juridique du Contrat de Régulation Économique qui l’empêche d’aller trop loin dans sa mission de contrôle des tarifs d’ADP. Elle s’était en effet référée au Code des Transports dans sa première décision de non homologation des tarifs 2019. Une parade qui lui permettait de se faire sa propre opinion indépendante sur les CMPC (Coût Moyen Pondéré du Capital) et autres ROCE (Return on Capital Employed) qui sont le point de discorde fondamental entre ADP et les compagnies aériennes dans la gouvernance du CRE en faisant varier les niveaux tarifaires du tout au tout selon les hypothèses retenues.
Mais il faut croire que la tutelle de l’ASI a su trouver les mots justes pour couper l’ASI dans son élan, peut-être aidée en cela par la réforme annoncée de l’ASI au sein de la loi Pacte encore en discussion au Parlement.
On ne nous fera donc pas croire que cette dernière décision de l’ASI d’homologuer les tarifs ADP 2019 n’est autre qu’une décision purement politique qui résulte d’un compromis de marchands de tapis, intervenu entre l’ASI, la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) et l’Agence des Participations de l’État (APE).
Une remise au pas qui est parfaitement éloignée de la mission d’objectivation et d’indépendance de l’ASI.