L’autorité de régulation des transports (ART) vient de publier sa décision d’homologuer les hausses tarifaires de + 2,5% demandées par ADP, à l’heure où le transport aérien traverse la pire crise de son histoire. En France la baisse de trafic s’établit à plus de 70% en 2020 (source DGAC).
Cette décision de l’ART est d’autant plus incompréhensible qu’elle ne repose sur aucun fondement raisonnable comme le note l’ART elle-même dans son rapport : « le manque de transparence de la consultation menée par la société ADP », « le dossier ne mentionnait, ni les objectifs d’évolution de charges sur le périmètre régulé, ni le niveau de la base d’actifs régulés ».
Pendant ce temps, ailleurs dans le monde, les aéroports réduisent ou gèlent leurs tarifs pour accompagner le transport aérien dans la crise sanitaire :
- Europe : Amsterdam, Londres, Zurich, Rome, Francfort, Bruxelles, Milan, Stockholm, etc.
- Moyen-Orient : Dubaï, Djeddah, Riyad, etc.
- Asie : Pékin, Shanghai, Canton, Hong-Kong, etc.
- Amérique : Bogota, Cancun, Mexico, Santiago du Chili, Sao Paulo, etc.
En France, seuls trois aéroports français demandent une augmentation de leurs tarifs : ADP (+2,5%), Lyon (+9%) et Marseille (+8,2%), les augmentations demandées par ces deux derniers aéroports pour 2021 ont été invalidées par l’ART.
L’ensemble du processus qui a amené l’ART à l’homologation des tarifs d’ADP dans une totale opacité, et en faisant abstraction de la crise économique mondiale, montre les limites du système. Ce dernier avatar d’un temps révolu met en évidence l’urgence de la refonte de la relation aéroportuaire, demandée depuis le début de la crise sanitaire dès le mois de mars par le SCARA.
Dans ce contexte, la seule bonne décision eût été un gel des tarifs pour 2021.
Il est en effet inadmissible qu’ADP continue sa quête effrénée d’un profit maximal au détriment de ses clients, compagnies aériennes.
En 15 ans ADP a augmenté ses tarifs de 48,1% alors que l’inflation dans le même temps était de 21,6% et que le prix des billets d’avion a baissé de 10% à 15%. Ces augmentations de tarif de plus de deux fois l’inflation ont largement profité à ADP qui, depuis plus de 10 ans enregistre des bénéfices de l’ordre de 15 % de son chiffre d’affaires. Pour mémoire, les bénéfices des compagnies aériennes se situent en 1% et 4% de leur chiffre d’affaires les meilleures années.
Par ces temps de crise sanitaire, ADP se devrait de participer à l’effort de l’ensemble du transport aérien en puisant dans ses réserves financières et non pas en alourdissant un fois de plus les charges des compagnies aériennes.
Il est donc plus que temps de repenser la gestion des plateformes aéroportuaires françaises comme le réclame le SCARA depuis le début de la crise sanitaire.
Cette refonte doit passer par :
- L’abandon du système de « double caisse » contraire à l’intérêt général,
- L’arrêt des privatisations d’infrastructures stratégiques pour la Nation,
- La reprise par l’État de ses fonctions régaliennes dans les aéroports, à commencer par la sûreté.